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Urtica dioica, l’Ortie commune.

Urtica dioica, l’Ortie commune.

Photo d’entête : Urtica dioïca, « poils » urticants Wikipédia, par Frank Vincentz.

Considérée comme une mauvaise herbe, elle est redoutée pour son caractère urticant.
Ralph Waldo Emerson :
« Une mauvaise herbe est une plante dont on n’a pas encore trouvé les vertus ».

Pourtant, ses propriétés sont nombreuses, elle est utilisée dans les domaines alimentaire, agricole, industriel et médical. Elle a été utilisée empiriquement depuis des millénaires (régimes alimentaires et médecine traditionnelle humaine et vétérinaire).
Elle faisait partie de la pharmacopée des Gaulois, des Grecs et des Romains!

Nutriments essentiels : protéines, fer, magnésium, calcium, vitamines A, C et K.

« Une ortie au poulailler, c’est un oeuf de plus dans le panier. »

Victor Hugo romancier dans Les Misérables lui consacre un chapitre entier, où il écrit notamment : 

« Quand l’ortie est jeune, la feuille est un légume excellent ; quand elle vieillit, elle a des filaments et des fibres comme le chanvre et le lin. La toile d’ortie vaut la toile de chanvre. Hachée, l’ortie est bonne pour la volaille ; broyée, elle est bonne pour les bêtes à cornes. La graine de l’ortie mêlée au fourrage donne du luisant au poil des animaux.

Mais laissez moi me présenter : Cosmopolite et rudérale, je suis une Urticacée (Famille de 700 espèces) fan des sols déséquilibrés par l’activité humaine ( j’adore en particulier les tas de feraille) .
Ma présence permet de reconnaître, longtemps après leur abandon, des lieux qui furent autrefois habités.

Mes tiges peuvent s’élever à plus de 2m de haut, de section quadrangulaire, elles sont non ramifiées (sauf si je suis décapitée par un cueilleur ou un herbivore !), je vais alors repartir par des rejets latéraux .
Elles portent soit des fleurs mâles, soit des fleurs femelles, je suis dioïque, d’où mon nom.

N.B. : Autres plantes dioïques : Bryonnia dioica, les Saules, le Houx, le Ginkgo, le Houblon, …

Comment me distinguer moi, la Grande Ortie (Urtica dioica) de l’Ortie brûlante (Urtica urens)?
Cette une fausse jumelle est plus petite (entre 20 et 60 cm seulement), annuelle (elle ne résiste pas au gel) et présente côte à côte sur un même pied fleurs mâles et fleurs femelles, ses feuilles sont aussi larges que longues et sa racine est pivotante, la mienne est un rhizome d’où sont issues de fines racines adventives.

Comparaison des feuilles de U. urens et U. dioica . Saurez-vous les reconnaître ?

Feuilles d’Orties, à gauche par Telabotanica et à droite par Notes de terrain.

Tableau de comparaison :

Comparaison U. dioica et U. urens par notesdeterrain.

N.B. : Il existe de nombreuses variétés d’U. dioïca, une seule d’U. urens.

Comparaison des inflorescences femelles et mâles de U. dioica par la LPO (Ligue Protectrice des Oiseaux)
Voir : Les bienfaits de l’ortie piquante (U. urens) par La Vie Naturelle

Quatre espèces sont présentes en France : la grande ortie (Urtica dioica) qui est la plus abondante, l’ortie brûlante (Urtica urens), l’ortie à pilules ou ortie romaine (Urtica pilulifera) présente dans le midi et à l’ouest ainsi que l’ortie atrovirens (Urtica atrovirens) présente uniquement en Corse (endémique).

À gauche, les fleurs femelles, avec leur stigmate en «pinceau» et leur port retombant.
À droite, les fleurs mâles avec leurs étamines saillantes et leur port dressé à maturité.

Mes rhizomes vivaces sont pourvus d’un chevelu dense de fines racines adventives me permettant de coloniser un milieu favorable sous la forme d’un peuplement ne laissant place à aucune autre espèce et formant ainsi une population clonale (donc de même sexe) sur plusieurs mètres carrés.
Les décoctions de mes racines sont utilisées dans le traitement de l’hypertrophie bénigne de la prostate.

Le saviez-vous ? Texte par Sauvages du Poitou :
Les massifs d’Orties bien exposés au soleil peuvent servir de lieux de ponte à cinq espèces de papillons de jour, appartenant à un groupe appelé vanesses (Vanessa).

Nurserie de chenilles de Petite tortue ((Aglais urticae) )sur feuilles d’orties.
Photo prise lors de la sortie Prairies humides de la Seille le 30 avril 23.

Wikipédia : En Europe de l’Ouest, l’ortie est la plante-hôte obligatoire d’une trentaine d’insectes dont des papillons diurnes (pollinisateurs importants, souvent en voie de régression) tels que le Paon-du-jour (Aglais io), le Vulcain (Vanessa atalanta), la Carte géographique (Araschnia levana), et la Petite tortue (Aglais urticae). L’ortie est aussi l’hôte de papillons de nuit tels que la Pyrale de l’ortie (Eurrhypara hortulata). Elle accueille aussi facultativement la Belle-Dame ou Vanesse des chardons (Vanessa cardui), qui, comme son nom l’indique, pond aussi sur les chardons, et le Robert-le-diable (Polygonia c-album), qui pond parfois aussi sur le houblon.

Les fibres d’Urtica dioica ont été utilisées par l’homme dans la confection de cordages ou de vêtements (sacs, pulls ou même chaussettes). Une utilisation ancestrale, puisque la momie Ötzi retrouvée dans les glaces des Alpes italiennes en 1991 (surnommée «Hibernatus» en France) était équipée d’un fourreau à couteau en fibres d’orties (Hibernatus vivait probablement entre 3350 et 3100 ante Christum).

N.B. : , c’est à partir des fibres très résistantes d’une autre Urticacée (Boehmeria nivea, alias la Ramie) proche de l’Ortie, originaire d’Asie et cultivée en Chine, que la Banque de France fabrique nos billets!

Enfin, le purin d’ortie, obtenu par macération des feuilles hachées dans de l’eau, est utilisé en agriculture biologique pour tuer ou repousser les insectes et comme fertilisant.

Recette du purin d’Ortie : Mettre le volume d’un sac de courses de feuilles d’orties hachées dans un grand filet à pommes de terre placé dans un grand seau (pas en métal) et recouvrir d’eau de pluie. Couvrir le seau et le placer à l’ombre. Laisser macérer 2 semaines en brassant chaque jour avec un bâton. Lorsque de petites bulles apparaissent, la décoction est prête. Filtrer le jus obtenu sur un tissu puis le diluer : 100 ml de purin dans 10 litres d’eau.
C’est un engrais naturel efficace qui stimule la croissance des plantes et les renforce contre certaines maladies. Il présente également un caractère répulsif face aux pucerons et aux acariens.
N.B. : Gardez le grand sac de pommes de terre pour l’année prochaine …
Le purin peut se conserver tout l’été dans un bidon plein, à l’ombre et fermé. Vidéo par GERBAUD.

Avis aux amateurs, l’Ortie a aussi été utilisée à des fins bien plus exotiques, telle la flagellation des atouts masculins pour traiter l’impuissance, appelée urtication.
Dans certains pays, une fois séchée, elle est utilisée comme nourriture pour crevettes.

Les bienfaits de l’Ortie…

La chlorophylle de l’Ortie sert de colorant vert pour les petits pois et les haricots verts en conserve.
Plante ferreuse, elle régularise la teneur en fer des sols, ce qui bénéficie aux autres plantes car le fer est nécessaire à la photosynthèse, à la synthèse de chlorophylle, à la respiration végétale et à la formation de certaines protéines et de la lignine. Il joue aussi un rôle dans l’absorption de l’azote.
Le fer est un transporteur d’oxygène chez les plantes comme chez les animaux (il entre dans la composition de l’hémoglobine et de la myoglobine). Elle sert à oxygéner les cellules de la plante.
La chlorophylle des plantes vertes se rapproche beaucoup de l’hémoglobine du sang humain.
D’un point de vue moléculaire, les mêmes éléments composent la chlorophylle et l’hémoglobine, à l’exception de l’atome central : Fer dans l’hémoglobine, Magnésium dans la chlorophylle. Lien.

Comparaison des molécules de Chlorophylle et Hémoglobine par l’herbier d’Habren.
C’est le fer qui donne au sang humain sa couleur rouge et le magnésium qui donne à la chlorophylle des plantes sa couleur verte.

N.B. : En grec, kloros signifie « vert » et phyllos signifie « feuille ».

Mais parlons de mes piquants !

Photo par Pancrat (Wikimedia) On observe les 2 types de « poils »

Certains parlent de poils, sachez que le terme est réservé aux mammifères.
Il existe 2 types de piquants : des piquants longs et urticants et des piquants petits et souples.

Le piquant est un véritable dard. Creux, il se termine par une pointe en silice se plantant comme une aiguille dans l’épiderme ; l’« ampoule » qui le coiffe, très fragile, se brise à la moindre contrainte, comme du verre très fin, injectant dans la peau un liquide urticant qui peut provoquer des démangeaisons pouvant persister 36h.

Ce liquide contient de l’acide formique.
On le trouve dans les glandes de plusieurs insectes de l’ordre des hyménoptères, comme les abeilles et les fourmis.

Son nom vient du mot latin formica qui signifie fourmi, car il fut isolé pour la première fois par distillation de cadavres de fourmis.« . C’était en 1671, par le naturaliste britannique John Ray.
Les fourmis le projettent quand elles se sentent menacées. Certaines espèces peuvent le projeter à plus d’1m.

Lorsque les piquants se brisent (comme l’extrémité des ampoules de verre contenant des médicaments liquides), ils injectent également dans la peau de l’histamine qui provoque la sensation de démangeaison et les troubles de la motricité des vaisseaux responsables des bouton et des rougeurs.

La densité de ces piquants augmente chez les plantes agressées (broutage, cueillette, piétinement, …)
Les plantes sont donc capables de réagir !
N.B. : On peut calmer les brûlures en froissant sur la peau des feuilles fraîches de Grand plantain (entre autres).
Chez l’ortie, les piquants sont généralement orientés vers le haut, ce qui rend possible sa cueillette à main nue en pinçant doucement la tige tout en remontant les doigts vers le haut.
La récolte avec des gants suffisamment épais est cependant moins risquée.
Vidéo de la cueillette par Christophe de HODY : Les chemins de la nature.

Les herbivores dépendent des plantes pour leur alimentation, ils ont acquis des mécanismes offensifs pour contourner les adaptations défensives chimiques ou mécaniques des plantes. Mais ces mécanismes ont fait que les plantes, ont acquis de nouvelles « inventions » en retour pour contourner leurs défenses on parle de « coévolution ».
La coévolution entre les plantes et les herbivores qui aboutit finalement à la spéciation des deux parties est expliquée par l’hypothèse de la reine rouge.
L’adaptation des herbivores à la défense des plantes est illustrée par de multiples exemples dans la nature dont nous n’avons découvert qu’une infirme partie.
Exemple d’une histoire née en afrique du sud …. Le grand koudou et l’accacia
En résumé : L’acacia augmente en quelques minutes la concentration en tanins de son feuillage en réaction au broutage des herbivores, ce qui a pour effet d’inhiber la digestion. ​L’augmentation de la concentration en tanins est détectable par les herbivores qui s’éloignent alors pour chercher une autre source d’alimentation plus saine. Dans l’histoire ci-dessus, les koudous en captivité n’ont pas eu ce choix.

Document n°1 – Un grand koudou (Tragelaphus strepsiceros) mâle. Par le sourire du flamant rose.
Document n°2 – Lorsque brouté, l’acacia local (Acacia caffra) augmente dans ses feuilles la concentration de tanins (ou tannins), bloquant la digestion des koudous. Par le sourire du flamant rose.

Et pour terminer, quelques recettes ….

Omelette aux orties et au fromage de chèvre par Sauvagement bon, le blog d’un restaurant localisé à Lamballe, dans les Côtes d’Armor.

Recette de soupe aux orties.

Autres recettes à base d’orties.

Les vertus insoupçonnées d’une plante mal aimée (vidéo)

N.B. : Il faut cueillir les orties jeunes (avant floraison) et dans des endroit non pollués…

L’ortie, une mauvaise herbe ? Non, un trésor !

Je laise le mot de la faim à ….

  • La chlorophylle doit être consommée préférentiellement à l’état cru, puisque la chaleur, et a fortiori la cuisson, la déstructurent complètement. Les aliments verts perdent 30% à 50% de leur chlorophylle lorsqu’ils sont cuits ;
  • Toujours associer des légumes verts ou de la salade à la consommation de viande cuite pour neutraliser les composés cancérogènes issus de sa cuisson.

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